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Retour sur la Conférence des Grands Témoins sur l'Open data du 8 juin 2021

Retour sur la Conférence des Grands Témoins sur l'Open data du 8 juin 2021

L’ouverture des données publiques : pour générer de la valeur et créer de nouveaux services.

Retour sur les débats organisés par le GIP Maximilien et Paroles d’Élus.

Le 8 juin dernier le GIP Maximilien organisait, avec son partenaire Paroles d’Élus, la 1ère Conférence des Grands Témoins sur le thème de l’ouverture des données publiques.

Journaliste pour Paroles d’Élus, Valentin Goethals a présenté la conférence, son thème et ses cinq invités réunis en visioconférence pour partager, avec la centaine de participants en ligne, leurs analyses et retours d’expérience dans le domaine de l’open data publique :

  • Antoine CARETTE, Directeur adjoint Donnée, Numérique et Smart Région à la Région Île-de-France,
  • Isabelle MATHÉ, Directrice Business Development Régional - Smart City chez Orange Business Services,
  • Bertrand MONTHUBERT, Conseiller régional d’Occitanie délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche, Président d'Occitanie Data,
  • Mauna TRAIKIA, Vice-présidente chargée du numérique au GIP Maximilien, Conseillère territoriale développement numérique à Plaine Commune Grand Paris,
  • Emeline VANDEVEN, Consultante commande publique et open data chez Datactivist.
De gauche à droite, de haut en bas : Mauna Traikia, Antoine Carette, Isabelle Mathé, Bertrand Monthubert, Emeline Vandeven

La synthèse de cette conférence, proposée ci-dessous, a pour vocation de mettre l’accent sur les cas d’usage, les pistes de réflexion et les axes de progrès présentés par chacun des intervenants au vu de leurs métiers et expériences. Il reflète une majorité des interventions mais n’est en aucun cas exhaustif.

 

  • Pour voir ou revoir l’intégralité de cette conférence, suivez le lien.

En quoi l’ouverture des données publiques est-elle un enjeu pour Maximilien ?

 

En guise de préambule aux débats, Valentin Goethals a demandé à Mauna Traikia, en tant que porte-parole de Maximilien, d’expliquer l’approche du GIP francilien sur la question de l’open data.

« On a récemment candidaté au Plan France Relance, avec un projet d’observatoire de la commande publique autour de l’open data suivant, d’une part, une vision citoyenne pour donner plus de transparence aux politiques publiques (rappelons que la commande publique représente 11 milliards d’euros pour la France). D’autre part, l’objectif de cet observatoire est d’être un outil d’aide à la décision et un indicateur de performance bienveillante pour les acteurs publics ». L’élue de Plaine Commune Grand Paris en charge du développement numérique a souligné que le GIP Maximilien était précurseur sur la commande publique et également sur l’open data et l’open source, qui sont deux grands vecteurs inscrits dans le Plan France Relance. « D’ailleurs, la stratégie 2021-2023 du GIP Maximilien présentée ce matin par Daniel Coissard, son Directeur, va dans ce sens-là ».

Favoriser l’efficience des politiques publiques

 

L'open data permet notamment, grâce à la Data Visualisation, de donner à voir l'efficience des politiques publiques.

La Data Visualisation permet de rendre plus intelligible les données collectées grâce à des illustrations claires et compréhensibles par tous. 

Pour illustrer son propos, Mauna Traikia a présenté un exemple de cartographies autour du handicap et des mobilités mises en place par des associations pour montrer l’intérêt du partage des données ouvertes. Par cet exemple on voit que « l’open data est une source d’inspiration pour améliorer de manière très bienveillante nos politiques publiques ».

 

Ouvrir les données publiques ne suffit pas, il faut leur donner une utilité.

Emeline VANDEVEN, Consultante commande publique et open data chez Datactivist
Invitée par le journaliste de Paroles d’Élus à réagir aux propos de Mauna Traikia, Emeline Vandeven a fait part de ses observations : « Nous avons encore pas mal de travail sur la partie open data de la commande publique même s’il y a un élan global ». La consultante de Datactivist a tenu à rappeler que l’open data était une obligation renforcée au 1er octobre 2018, faisant partie du package de la dématérialisation des procédures de marchés publics. De ce fait, selon elle, l’open data n’a pas été forcément identifiée comme étant un sujet prioritaire chez les acheteurs publics.

 

Rassurante, Emeline Vandeven a toutefois temporisé : « les choses bougent et l’étape qu’il faut franchir maintenant est de donner du sens à tout cela. C’est très bien d’ouvrir les données de la commande publique mais il faut leur donner une utilité, faire en sorte que les entreprises et l’administration mais surtout la société civile (citoyens, journalistes, chercheurs etc.) s’en saisisse pour leur donner un sens et prioritairement placer la donnée au cœur des politiques achats. Soulignant que la réutilisation en interne des data est essentielle avant de leur donner un usage vis-à-vis de l’extérieur, Emeline Vandeven a conseillé de « placer cette donnée dans une stratégie achat globale en s’en resservant d’abord en interne et, dans un second temps, en allant la valoriser vis-à-vis des entreprises, des citoyens, de la société civile ».

 

Datactivist est une SCOP (Société Coopérative et Participative) créée il y a 5 ans par deux cofondateurs (aujourd’hui 15 associés) qui voulaient accompagner les acteurs publics dans la mise en œuvre de la Loi  pour une République numérique promulguée fin 2016 (Loi Lemaire).
90% des clients sont des administrations que Datactivist accompagne dans l’ouverture de leurs données.

L’acculturation des agents des services de la commande publique est essentielle

 

L’open data a été considérée jusqu’à présent comme une tâche en plus à faire à la fin d’un processus achat, comme l’explique Emeline Vandeven.

Pourquoi ? Parce qu’on n’a pas encore donné assez de sens à l’utilisation de ces données en interne et vis-à-vis de l’extérieur. « Ce qu’il faut pour que les choses changent profondément, suggère la consultante, c’est qu’il y ait une acculturation des agents, au sein des services de la commande publique, à la data et à l’open data ». Pour argumenter cette piste l’intervenante a expliqué que cela se passait très bien dans des structures qui disposent d’un pilotage de la politique de l’open data, soit par un service identifié en interne, ou bien quand il y a un portage des élus. « Dans ce cas-là le sujet est beaucoup plus fluide et pris en main de façon plus transverse, pas seulement par les services de la Commande Publique ».

 

L’open data doit avoir du sens, ne pas être vue comme une contrainte

 

 

A l’invitation de l’animateur de la conférence de présenter Occitanie Data, son président, Bertrand Monthubert a expliqué que la genèse de cette association de préfiguration (qui se transforme en GIP en 2021 sous le nom d’EkitIA), était en lien et en complément avec toute la démarche open data. « En tant qu’élu j’ai pu piloter le travail auprès des services de la Région pour entrer dans une démarche d’open data. » Sans minimiser la difficulté de la tâche, l’élu de la région Occitanie a prôné que « cette démarche devait avoir du sens, ne surtout pas apparaître comme une contrainte. 

 

A cela s’ajoute une dimension d’usage, et le besoin de s’interroger sur ce qu’on fait des données qui ne peuvent être ouvertes (confidentialité) mais pourraient servir à des projets précis », un objectif dont se sont emparés les acteurs publics et privés qui se sont réunis pour créer Occitanie Data. Des acteurs qui sont à la fois des collectivités territoriales, des grandes institutions nationales comme le CNES ou l’IGN, des acteurs académiques, des acteurs du monde de la santé, des entreprises (des start-up comme des grands groupes internationaux ayant leur siège en France). Occitanie Data a pour objectif de créer un cadre de confiance pour des usages de la donnée multi-organisations, le besoin étant de croiser les données issues de plusieurs sources.

Quand les données sont ouvertes, c’est facile, mais que faire quand elles ne le sont pas ?

 

Dans de nombreux cas l’open data n’est pas possible parce qu’il y a des données, par exemple personnelles, qui ne peuvent pas être ouvertes, ou bien parce que cela conduit à les agréger, conduisant à un degré de granularité insuffisant. D’où la nécessité, comme le suggère Bertrand Monthubert, de mettre en place des mécanismes, un cadre éthique qui permette de légitimer les traitements de données à opérer sur des données plus sensibles. Adossé à celui-ci il faut définir un cadre économique d’autant que les différents acteurs peuvent avoir des intérêts en jeu. Et enfin un cadre technologique pour rendre possible la réalisation de traitements multi-organisations. « C’est autour de ces axes-là qu’Occitanie Data a déployé son travail en créant une charte éthique de l’économie de la donnée (publiée en 2020) et en accompagnant un certain nombre de cas d’usages ».

Occitanie Data : de l’association de préfiguration vers le GIP  

  

La transformation en GIP marque plusieurs évolutions. D’abord l’objectif du GIP est de doter Occitanie Data d’une envergure nationale pour permettre la collaboration avec des acteurs dans toute la France voire en Europe et au Canada. De plus, OD s’ouvre à de nouveaux membres et va dans le même temps s’organiser sous forme de 5 collèges qui auront le même nombre de sièges au conseil d’administration. Avec une majorité de voix pour les acteurs publics (c’est une nécessité dans le cas d’un GIP) mais avec un équilibre garanti entre acteurs publics et privés.
 

Le voyage de la donnée au sein des projets smart city

 

 

« Quatre piliers constituent notre approche smart cities, explique Isabelle Mathé, Directrice Business Development Régional - Smart City Chez Orange Business Services : améliorer la relation citoyenne, développer l’attractivité et l’économie du territoire, augmenter l’efficience de la gestion des services urbains et préserver l’intégrité des données et des services. L’ensemble de ces quatre piliers est fédéré de manière centrale par la donnée et la gouvernance de la donnée. On suit ce qu’on appelle chez nous le voyage de la donnée, c’est-à-dire qu’on fait la collecte, le transport, stocker et traiter la donnée, l’analyser, la partager et créer.

Et en transverse on a « se protéger » et « sécuriser ». Ce qui veut dire qu’on a des savoir-faire sur l’ensemble de ce voyage de la donnée. Mais un projet smart city ce n’est pas un seul acteur c’est un ensemble d’écosystèmes publics-privés du territoire. Donc on s’adapte et on intervient en fonction des types de projets à différents niveaux avec soit des briques technologiques, soit des savoir-faire et notamment développer une méthodologie qu’on met en œuvre très régulièrement sur justement la donnée, comment l’exploiter. On met cela en œuvre par exemple sur le Havre et le Port du Havre pour un des territoires d’innovation, ou d’une manière un peu plus systématique pour des clients. Donc la donnée est bien centrale à l’ensemble de ces piliers ».

 

La valeur réside dans de nouvelles formes de partenariat au niveau des acteurs du territoire

Isabelle Mathé, Directrice Business Development Régional - Smart City chez Orange Business Services

« Effectivement il faut absolument que les acteurs du territoire aient chacun une partie de la solution, ajoute Isabelle Mathé. Il faut déjà avoir une acculturation de la data au niveau des élus et des agents des collectivités – et cela même avant le portage juridique ; les portages juridiques sont souvent des conventions d’expérimentation, ce qui permet de mettre tout le monde autour de la table. On fait avec eux l’inventaire de l’existant et des data collectées, puis on construit la gouvernance. Et dans la gouvernance on rajoute à l’écosystème des juristes. Après on part sur des marchés d’innovation puis le traitement de la donnée. Donc avec ces premières étapes, on a défini les cas d’usages, ce qu’on avait comme données, ce qui nous manquait et l’état de la donnée.

 

Traiter la donnée c’est quelque part contrôler d’abord sa qualité (« ce que je mets en entrée je vais le retrouver en sortie »), la fraîcheur de la donnée, la complétude et qu’elle soit prête à l’emploi, pour que justement chacun des acteurs puisse bénéficier ensuite du retour de ce qu’il a mis dans la plateforme data. Après, on propose donc des plateformes pour un pilotage quotidien et des tableaux de bord qui vont être à la main des différents acteurs et qui vont rendre visuelle la data. Les interlocuteurs peuvent vraiment prendre conscience de ce que cela apporte et comment la manipuler pour pouvoir en tirer encore plus de valeur ».

Exemple dans la Nièvre de création de valeur par rebond à partir de l’ouverture des données.

 

Utilisatrice d’une plateforme d’Orange appelée « Ma ville dans ma poche », Nevers Agglomération avait pour objectif d’encourager la mobilité verte multimodale en proposant des itinéraires cyclables aux citoyens. La plateforme « Ma ville dans ma poche » ne contenant pas de données, Orange a fait appel à la société HERE Technologies, un partenaire européen spécialiste de la géolocalisation, qui a récupéré des données ouvertes issues de l’agglomération pour créer des cartes numériques des pistes cyclables. « Cet exemple montre que ce n’est pas en ayant directement accès aux données que nous avons pu réaliser ce cas d’usage mais via un partenaire, d’où une création de valeur par rebond» a expliqué Isabelle Mathé.

Comment veiller à garantir la propriété des data territoriales ?

Mauna Traikia : « La gestion de la donnée est primordiale pour les collectivités, et je suis convaincue que les prochaines licornes européennes seront basées sur les nouveaux services qu’on va pouvoir inventer à partir de la richesse de ces data territoriales. Mais nous devons garantir la propriété de ces données - nous menons actuellement des travaux dans ce sens - et nous devons nous assurer qu’elle ne nous échappe pas au profit des leaders mondiaux du Numérique, les GAFAM américains (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) et les BATX chinois (Baidu, Alibaba, Tencent et Xiaomi) qui s’y intéressent de plus en plus. Heureusement, nous avons encore la main aujourd’hui sur les données collectées par les collectivités locales et territoriales ainsi que par l’Etat et qui concernent notamment la vie du citoyen et la gestion des collectivités. »

Lire la suite de l’entretien avec Mauna Traikia  

Ouvrir ce n’est surtout pas se déposséder, au contraire c’est reprendre la maîtrise de
son patrimoine de données

Antoine CARETTE, Directeur adjoint Donnée, Numérique et Smart Région à la Région Île-de-France

À la Région Île-de-France, Antoine Carette explique que la question est de se demander en quoi l’ouverture de cette donnée est utile, concrètement pour rendre plus de services au public et améliorer les services existants. « J’entends régulièrement les acteurs publics dirent « l’opendata on est un peu réticent car ça serait une forme, d’une certaine manière, de se déposséder de la donnée. Nous acteurs publics on met un investissement conséquent pour mettre en qualité de la donnée, l’ouvrir. Et puis en fait on la donne et le secteur privé en fait ce qu’il veut. »

 

Toute démarche d’ouverture de la donnée est un moyen de se réapproprier sa propre donnée, a expliqué Antoine Carette. D’une part parce que cela permet de mieux maîtriser le patrimoine informationnel (le patrimoine immatériel de la collectivité), son périmètre… D’autre part, parce qu’en matière de commande publique il y a la donnée essentielle mais aussi toutes les données qui sont générées dans le cadre des marchés publics, des délégations, des concessions. « C’est important de réaffirmer le caractère public de cette donnée et de se réapproprier cette donnée. C’est un grand enjeu ». A ce titre Antoine Carette a invité les participants à la conférence à lire la boîte à outils pour la gestion des données territoriales publiée en janvier 2021 par la Banque des Territoires.

La boîte à outils, composée d'un guide à destination des décideurs locaux, un guide des bonnes pratiques contractuelles, une cartographie des ensembles de données, a pour but d’accompagner les collectivités dans l’élaboration d’une stratégie et d’une gouvernance de la donnée.

L’open data est une opportunité de redevenir maître de ses données

« Il faut faire pragmatique, conseille Antoine Carette, se dire quelle valeur ajoutée cela a pour moi, pour que je sois plus efficace dans la manière dont je produis mes services. Se dire que l’open data c’est vraiment une opportunité de redevenir maître de ses données. C’est aussi de la transversalité : quand vous allez publier un jeu de données en open data, les premiers utilisateurs en termes de volume ce sont d’autres collègues en interne dans votre collectivité. C’est avant tout un outil, une démarche pour soi pour mieux servir les autres ».

 

Une démarche pas à pas, prônée par la Région Île-de-France

Explications d’Antoine Carette : Notre méthode à la Région Île-de-France est d’être très pragmatique et d’y aller pas à pas, parce que c’est toujours un investissement important. La logique consiste à se demander comment on développe, on enrichit, on améliore les services publics. La meilleure façon d’aborder cette question est de sélectionner quelques domaines stratégiques dans lesquels on identifie un vrai besoin. La Région propose aux acteurs publics un partenariat autour des données et des services numériques qui permet d’intégrer une communauté de partenaires publics, privés, associatifs, de recherche. La Région propose aux acteurs publics de venir exposer ses problématiques, ses besoins, ses données, se demander quelle en est la valeur, l’utilité. Tout cela s’articule autour de la plateforme Ile-de-France smart services qui permet à chaque acteur public comme privé, comme citoyen de venir partager de la donnée. Ce qui est intéressant ce sont tous les services publics qu’on va développer autour de ces données. Actuellement il y en a plus de 20  qui sont disponibles autour de 4 thématiques : la qualité de vie, l’environnement et l’énergie, découvrir et apprendre, entreprendre.

Trois cas d’usage présentés par Emeline Vandeven

 

  • Focus Marchés du GIP Territoires Numériques Bourgogne-Franche-Comté

Le GIP Territoires Numériques a développé l’outil Focus Marchés, un site qui permet de visualiser la valorisation des données essentielles des acheteurs publics qui sont membres de ce GIP. Cet outil permet de voir très concrètement ce qu’on peut faire de ces données essentielles, comment on peut les faire parler et les visualiser.

 

  • Le projet SCOPE en Occitanie

Datactivist a accompagné la Préfecture d’Occitanie pour la mise en œuvre du projet SCOPE, une plateforme dématérialisée qui centralise tous les marchés au niveau de la région Occitanie. Les acheteurs publics situés sur ce territoire sont invités à publier leur DCE en cours et également des données de programmation achats, c’est-à-dire que les acheteurs publient des informations sur les procédures qu’ils vont lancer dans les semaines et les mois à venir. C’est très intéressant, souligne Emeline Vandeven, parce que cela permet aux acteurs économiques de programmer leur plan de charge et la manière dont ils vont se positionner pour répondre aux marchés publics lancés par les différents acheteurs. Un livre blanc intitulé « Vers une commande publique ouverte » a été rédigé à l’issue d’une journée collaborative en 2019 à Toulouse qui a réuni les principaux praticiens de la commande publique, la DAJ, la DAE, des éditeurs de profils acheteurs, des acheteurs et des entreprises. Ce livre blanc identifie les freins de la mise en œuvre de l’open data dans la commande publique, mais aussi des préconisations et surtout 5 futurs souhaitables. Ce livre blanc permet d’imaginer comment pourrait être la commande publique si les données étaient plus ouvertes ; il propose également des scenarii prospectifs à issue 2025-2030 permettant d’imaginer les nouveaux services ou outils déployés si les données de la commande publique (en se basant sur des données étendues) étaient encore plus ouvertes.

 

  • Un hackaton Covid en avril 2021

Celui-ci a été organisé par Datactivist à la demande de la DITP (Direction Interministérielle de la Transformation Publique) et en partenariat avec Guillaume Rozier et d’autres acteurs. Ce hackathon Covid visait à utiliser toutes les données qui ont été ouvertes pour suivre la pandémie. L’axe de travail était de dire : « à partir des données ouvertes comment on fluidifie la campagne de vaccination, comment on suit les malades du Covid sur le long terme, comment imaginer d’autres outils pour suivre différemment la crise ? Cela a donné lieu notamment à l’ouverture des données du réseau Obépine qui est l'observatoire épidémiologique des eaux usées. Ce hackathon Covid a réuni plus de 200 personnes (société civile et administrations réunies) qui ont réfléchi ensemble à la création de nouveaux outils pour suivre d’une nouvelle manière cette crise sanitaire ».

 

Il faut aller au-delà et explorer tout le potentiel d’usages des données y compris celles qui ne sont pas ouvertes

Bertrand Monthubert, , Conseiller régional d’Occitanie délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche, Président d'Occitanie Data

Un cas d’usage présenté par Bertrand Monthubert : le CHU de Montpellier

L’enjeu est de cartographier les zones qui sont le plus à risque pour le Covid de manière à pouvoir mettre en place des politiques de prévention, de soins particuliers, de tests etc. Il y avait beaucoup de données à articuler que le CHU détient, notamment les données de santé, mais aussi des données qu’il n’a pas. Le CHU va donc recourir à des données en open data, notamment celles de l’INSEE (les données IRIS). Occitanie Data a accompagné ce cas d’usage avec le CHU de Montpellier et une start-up appelée KanopyMed. D’abord en travaillant sur le cadre éthique car il fallait s’assurer que les usages allaient se situer dans le cadre de l’intérêt public ou de l’intérêt général. En réalisant cette cartographie, et en fonction de la manière dont on va l’utiliser, on peut avoir quelque chose de très positif pour venir en aide aux populations, identifier les clusters pour éviter qu’ils ne se propagent. On pourrait aussi avoir des usages très stigmatisants par rapport à des cartographies et il faut donc être très vigilants.

 

À Occitanie Data nous avons accompagné KanopyMed au vu et conformément à la charte éthique que nous avons publiée il y a un an. Cette première étape réalisée, il faut maintenant aller plus loin. C’est là que l’open data montre à la fois ses forces et ses limites. On ne peut pas tout publier en open data : on ne peut pas publier les données sociales, les données de revenus de l’ensemble des français. En revanche comment arriver à croiser des données qui sont nécessaires à croiser avec une bonne finesse comme les données sociales et les données de santé, par exemple de manière à en tirer des enseignements statistiques ? C’est l’étape suivante sur laquelle nous sommes en train de travailler.

 

Bertrand Monthubert explique les enseignements qu’il tire de ce cas d’usage : « Il faut avoir plusieurs choses en permanence en tête quand on conduit une politique d’open data. C’est une des approches que j’avais au sein de la région Occitanie, je disais « regardez tout ce qu’on peut ouvrir mais s’il y a des choses qu’on ne peut pas ouvrir ne vous arrêtez pas là. Posez-vous la question de savoir si on pourrait faire néanmoins des traitements à certaines conditions, avec certains acteurs autour de ces données ? Le chantier est immense et en réalité il ne fait que démarrer. Il ne faudrait pas se dire, une fois que j’ai ma démarche open data je n’ai plus qu’à l’alimenter, l’entretenir. Il faut aller au-delà et explorer tout le potentiel d’usages des données y compris celles qui ne sont pas ouvertes et qu’on ne pourra pas ouvrir à tout le monde mais peut-être à certains acteurs, parce qu’il y a de la connaissance à en tirer qui va être utile à tout le monde.

Il faut aller plus vite pour la publication des données essentielles afin qu'elles servent à la construction des stratégies d’achats

Emeline VANDEVEN, Consultante commande publique et open data chez Datactivist

On parle beaucoup des données essentielles mais la loi pour une République numérique s’applique aussi à tous les jeux de données de la commande publique qui présentent un intérêt économique, social, sanitaire environnemental et qui doivent être publiés, eux aussi. Mon souhait est qu’on aille très vite au-delà de la simple publication des données essentielles. Que celles-ci soient déjà publiées à 100% partout, qu’elles servent en interne et qu’elles soient valorisées à destination des entreprises lors de rencontres des prestataires économiques, de sourcing et de bilans des politiques d’achat qui sont faits au terme d’une exécution annuelle.

 

Que ces données soient recoupées avec d’autres jeux de données. Par exemple si on recoupe les données essentielles avec des jeux de données INSEE, on doit être en mesure de déterminer le pourcentage de marchés attribués à des TPE-PME, déterminer si ce sont des TPE-PME locales ou pas.

 

Et puis le jour où il y aura davantage de données ouvertes, on pourra les recouper plus facilement et donc arriver à cette création souhaitée de nouveaux outils, de nouveaux usages et surtout arriver à sortir de la pratique actuelle consistant à ouvrir des données sans les rendre utiles et uniquement pour répondre à une obligation légale. L’idée est que chaque acheteur prenne le temps de mettre à plat toutes les données qu'il produit. Parce qu’il y a des doublons, des éléments à recouper notamment avec les services financiers. J’espère qu’il y aura une organisation de la donnée commande publique au sein de nombreuses administrations, que ces données serviront à mieux piloter en interne mais surtout qu’elles seront reprises par des entreprises et que certaines créeront de nouveaux outils.

 

C’est un devoir d’innover au niveau des collectivités et de la commande publique

Mauna Traika, Vice-présidente chargée du numérique au GIP Maximilien, Conseillère territoriale

 

Invitée à conclure cette conférence des grands témoins, Mauna Traikia s’est réjouie de tous les débats qui, de son avis, ouvrent de nombreuses perspectives y compris concernant la transformation du métier d’acheteur public comme évoqué par Emeline Vandeven. « C’est un sujet auquel le GIP Maximilien est attaché pour créer de nouveaux services  et faciliter le quotidien du métier d’acheteur, explorer de nouveaux champs, être plus efficients, se réinventer.

 

L’ouverture des données nous interroge et nous offre de nombreuses perspectives sur les sujets d’innovation de la commande publique, notamment.

C’est un devoir d’innover au niveau des collectivités et de la commande publique en lien avec les enjeux de développement économique ; il nous faut aussi accompagner le développement économique pour les citoyens et avec les citoyens au travers de cette ouverture de données, d’avoir à cœur cette innovation utile ».