Témoignage: Jean-Pierre Guglielmi, Président de l'Observatoire BTP de l'Insertion en Île-de-France
Pour une vision partagée des clauses sociales en Île-de-France
Pouvez-vous nous présenter l’Observatoire BTP de l’Insertion (OBTPI) ?
Notre Observatoire agit également auprès des maîtres d’ouvrages en cas de clauses abusives. La clause sociale dans un marché doit être cohérente avec la nature des travaux et le pourcentage de main d’œuvre nécessaire à la bonne réalisation du chantier. Elle doit être adaptée, c’est aussi le rôle de notre Observatoire d’alerter les maîtres d’ouvrages quand il y a des incohérences.
Nous assurons également une mission de promotion de nos métiers et de ses spécificités. Nous organisons des visites de chantier à destination des prescripteurs de l’emploi. Ces visites sont l'occasion d'expliquer les besoins des entreprises auprès de ceux qui orientent les publics vers nos métiers.
Il ne faut pas toujours penser l’insertion par le bas, l’insertion est une porte d’entrée sur le marché du travail pour les personnes sans qualification mais elle doit aussi l’être pour ceux qui sont qualifiés, voire diplômés, formés sur des activités spécialisées, mais qui rencontreraient des difficultés à accéder à l’emploi.
Comment situer votre observatoire dans le réseau MACS, quelle est votre participation et comment les échanges ont-ils évolué entre vous ?
L’OBTPI participe au groupe de travail régional de la MACS depuis son lancement. Notre observatoire, par la présence des représentants de nos organisations professionnelles, y porte la voix des entreprises de la construction. Participer à ce groupe de travail régional nous permet d'être au contact des maîtres d'ouvrages et de tous les acteurs de l'insertion en Île-de-France. Nous y contribuons en rappelant les propositions des entreprises pour une mise en œuvre cohérente de la clause sociale sur le territoire francilien.
Les relations entre notre Observatoire et le réseau MACS a permis d’échanger sur les publics éligibles, de faire évoluer l’approche sur l’apprentissage, et notamment de s’entendre sur la possibilité pour les entreprises d’embaucher dans le cadre d’une clause d’insertion un apprenti répondant aux critères d’éligibilité.
Pour vous, quelle est la valeur ajoutée de l’existence de la MACS ?
En réunissant l'ensemble des acteurs, la MACS a permis à notre Observatoire d'être au contact direct des réseaux, et notamment de l'URTIE, avec qui nous menons un travail collaboratif pour avoir une meilleure visibilité des pratiques des facilitateurs sur les territoires. L'un de nos objectifs à travers la MACS est de faire émerger au niveau régional la globalisation des heures d'insertion en s'appuyant notamment sur les bonnes pratiques locales.
Ces échanges nous permettent de mieux comprendre les enjeux de chacun dans le déploiement de la clause sociale. Ils nous amènent à travailler ensemble, à co-construire dans l'intérêt de tous et avant tout des publics cibles de l'insertion pour leur proposer des parcours professionnels durables.
La mise en place des coordinations départementales a également permis aux organisations professionnelles locales de renforcer leur dialogue avec le réseau local des acteurs de l'insertion. Depuis le lancement de la MACS, des projets communs avec les entreprises émergent sur les territoires : chartes locales, projets de visites de chantiers, projets d'action de promotion des métiers, etc.
Croyez-vous que l’observatoire régional des clauses sociales lancé en décembre 2017 peut ajouter de la valeur à votre travail ?
Notre Observatoire ne fait pas d’enquêtes statistiques à grande échelle. Aussi, l’observatoire régional des clauses sociales de la MACS permettra d'avoir des données régionales consolidées. A partir de ces données, nous pourrons évaluer les retombées de la clause sociale dans les marchés publics.
Au-delà de comptabiliser les heures et de relever des indicateurs, il nous paraît important d'évaluer l'impact sur l'accès à l'emploi durable. Ce dernier se traduit par la durée des contrats à la sortie des dispositifs d'insertion, la montée en compétence des salariés notamment grâce aux formations pré-qualifiantes et l’accompagnement social au quotidien des publics.
Ces données nous permettront de les mettre en perspective avec les retours terrains de nos entreprises sur les départements, et d’analyser les effets d’un développement croissant de la clause sociale. Dans les territoires où la clause se déploie et se traduit par des parcours professionnels durables, il faudra identifier les facteurs positifs et la manière de les déployer à l’échelle régionale.
Dans quelle mesure votre observatoire pourrait nourrir l’observatoire régional des clauses sociales?
Notre Observatoire peut être le relais des études auprès des entreprises adhérentes et peut faire le lien avec les territoires pour accompagner les dispositifs d’insertion. En s’associant à l’observatoire régional des clauses sociales, il sera intéressant d’élaborer ensemble des études thématiques pour identifier les leviers d’une insertion réussie.
Le retour des entreprises permettra de mettre en perspective les données quantitatives de l’Observatoire avec une analyse qualitative de la mise en œuvre de la clause sociale.
En ce sens, notre Observatoire promeut notamment que la clause sociale doit favoriser l’acquisition d’un métier. La qualification et la préparation des publics sont les conditions de l’emploi durable pour des personnes en insertion. Il faut que les pouvoirs publics accompagnent la mise à l’emploi de ces personnes. Nous avons des outils, comme les plateaux techniques, qui permettent d’allier la formation à nos métiers et l'embauche notamment via des contrats de professionnalisation.
Quels sont, selon vous, les enjeux prioritaires d’un tel observatoire ?
L'observatoire régional des clauses sociales doit permettre d'évaluer les retombées économiques et sociales de la clause sociale en Ile-de-France. Pour notre secteur d’activité, cet observatoire doit nous permettre de réfléchir aux actions à mettre en place pour que la clause sociale, en plus d’être un dispositif de lutte contre l’exclusion et le chômage pour les pouvoirs publics, soit un outil pour répondre aux besoins des acteurs économiques et leur permettre de recruter durablement. S'il y a des besoins dans le secteur du BTP, il y en a aussi dans les autres secteurs d'activité. Il faut élargir la clause là où il y a des perspectives d'emploi.
Ces données doivent nous conduire à valoriser les bonnes pratiques : formation préalable des publics, accompagnement social des candidats, diversification des profils et des secteurs d'activités, etc.
Il sera important néanmoins de ne pas limiter la vision de l’observatoire régional des clauses sociales aux seuls marchés publics, car le développement des clauses sociales est tout aussi important dans les marchés privés (bailleurs sociaux par exemple).
On trouve dans votre présentation 4 mots clés à souligner : FORMATION, ACCOMPAGNEMENT, COHERENCE et PERENNITE DE L’EMPLOI… cela résume vos objectifs?
Il manque l’ANTICIPATION car avant de faire de l’insertion dans les marchés, il faut connaître les intentions d’achat des donneurs d’ordre. En ayant une idée du volume d’activités, nos entreprises adaptent leurs besoins en personnel en fonction de la main d’œuvre et des compétences nécessaires à la réalisation des chantiers. Et pour répondre à ces besoins, il faut anticiper pour préparer les publics et leur offrir des opportunités de recrutement.
[1]Fédération Régionale des Travaux Publics d’Ile-de-France ; Fédération Ile-de-France Haute-Normandie, Centre SCOP BTP ; La FFB Région Ile-de-France (78-91-95) ; La FFB Ile-de-France Est ; La FFB Grand Paris