par Maximilien
COVID Commission européenne Marchés Publics

Des orientations de la Commission européenne sur l’utilisation des marchés publics en réponse à la désorientation des acheteurs

La Commission européenne a mis en ligne ce mercredi 1er avril des « orientations (…) sur l’utilisation des marchés publics dans la situation d’urgence liée à la crise du Covid-19 », proposant non pas de faire évoluer la règlementation mais d’en défendre la souplesse par la mise en lumière de solutions juridiques opérationnelles dans le droit existant. S’il est évidemment possible de discuter le fond de cette rhétorique, il s’agit plutôt ici de restituer aux acheteurs les justifications qu’ils peuvent en tirer pour l’adoption de leurs mesures d’urgence. Il faut rappeler que diverses mesures d’adaptation ont été prises par ordonnance et explicitées par la DAJ dans une fiche et une FAQ qui a vocation à être alimentée avec le temps.

De ce point de vue la publication de la Commission Européenne, insistant à six reprises sur la « souplesse » ou l’adaptabilité du cadre européen à la situation exceptionnelle actuelle, permet de donner des éléments de justification aux acheteurs dans les cas où ils mobilisent l’urgence.

 

Il est ainsi rappelé que les procédures formalisées peuvent bénéficier d’un délai de réception des candidatures et des offres réduit à 15 jours pourvu que l’urgence soit dûment justifiée. Le Code de la commande publique a bien intégré ces éléments comme l’indique l’article R. 2161-3 pour l’appel d’offre ouvert, les articles R. 2161-6 et -7 pour l’appel d’offre restreint, les articles R. 2161-12 (al. 2) et R.2161-15 pour la procédure avec négociation. Fait exception le dialogue compétitif pour lequel ni l’article 30 de la Directive 2014/24/UE relative aux marchés publics ni les articles R. 2161-24 et suivant du Code de la commande publique ne prévoient de possibilité de réduction des délais de remise des candidatures et des offres.

 

Par ailleurs, des éléments sont apportés par la Commission pour développer la justification de recours à la procédure sans publicité ni mise en concurrence de l’article R. 2122-1 du Code de la commande publique que justifie une urgence impérieuse. La Commission rappelle que 4 conditions doivent être réunies :

  1. Présence d’événements imprévisibles pour le pouvoir adjudicateur ;
  2. Urgence rendant impossible le respect des délais légaux ;
  3. Lien de causalité entre l’évènement imprévisible et l’urgence impérieuse ;
  4. Utilisation uniquement dans l’attente de solutions plus rapide.

 

La Commission se focalise ici sur les établissements de santé et hopitaux en soulignant ainsi que leurs « besoins spécifiques (…) en ce qui concerne le traitement des patients, les équipements de protection individuelle, les ventilateurs pulmonaires, les lits supplémentaires ainsi que les infrastructures de soins intensifs et les infrastructures hospitalières supplémentaires, y compris l’ensemble des équipements techniques, ne peuvent certainement pas être prévus et planifiés à l’avance et constituent donc un événement imprévisible pour les pouvoirs adjudicateurs »

Sur la deuxième condition, il est souligné que « La question de savoir s’il est alors impossible de respecter jusqu’aux délais très courts de la procédure accélérée (ouverte ou restreinte, 15 et 10 jours respectivement pour présenter les offres) devra être évaluée au cas par cas, mais la réponse est probablement affirmative dans la plupart des cas, à tout le moins en ce qui concerne les besoins à court terme considérablement exacerbés par la courbe croissante de l’infection ».

Enfin, les deux dernières conditions sont vues comme manifestement remplies. En effet, le lien de causalité entre les deux premières est évident et le recours à une telle procédure ne peut que constituer une solution d’urgence « dans l’attente de solutions plus stables, telles que des contrats-cadres de fournitures et de services passés selon les procédures normales (y compris accélérées) ».

 

Cette mise en lumière des possibilités offertes par le cadre normatif en vigueur s’accompagnent d’encouragement à des pratiques visant à rapprocher les acheteurs du marché. L’innovation, susceptible de donner lieu à un marché passé sans publicité ni mise en concurrence, est fortement encouragée dans la construction de solutions qui permettraient d’aboutir à un recyclage de masques ou à faire émerger des nouveautés d’autres types. La prise de contact directe est ainsi encouragée par la Commission qui y voit un moyen de sécuriser une chaîne d’approvisionnement, une meilleure connaissance des marchés etc. Il s’agit de bonnes pratiques déjà mises en œuvre par de nombreux acheteurs à l’occasion du sourcing, elles sont d’autant plus pertinentes dans le contexte actuel.